Lorsque j’ai décidé, il y a de cela quatre ans, de mettre la peinture de côté et de trouver un moyen d’expression plus écologique, je me suis tout d’abord tourné vers le recyclage. Admirative du travail de l’artiste Ann Weber, j’ai commencé à amasser du carton. Puisqu’elle parvenait à fabriquer des sculptures monumentales avec cet humble matériau et une agrafeuse, alors pourquoi pas moi ? Peu à peu, les boîtes de pizza et autres emballages ont envahi mon studio. La naissance de « Gobz », d’après l’une des créatures étranges qui peuplent mon monde imaginaire, s’est déroulée sans incident particulier et je me suis crue donc prête à entamer un projet plus ambitieux, « le Moguédon », père de Gobz. Hélas, des problèmes de santé ont stoppé net mon élan et depuis, « le Moguédon » est resté inachevé, avec sa corne toujours posée sur une étagère et son crâne lacunaire. Il trône dans mon studio comme un reproche permanent.
Qui ne conserve pas chez lui, en dépit de toute logique, un objet qui lui rappelle une désillusion ? Un robot ménager superflu (je l’avoue, je ne me suis servie de mon spiraliseur que deux fois, alors que les spaghettis de courgettes au four me paraissent délicieux) un équipement de sport délaissé (un pôle métallique, autrefois utilisé par ma fille, maintenant indémontable encombre notre chambre d’ami, c’est pourquoi nous n’invitons plus personne) ou un jeu d’échecs jamais ouvert (j’avais imaginé des soirées tranquilles et studieuses avec mes filles… Le fait qu’elles m’aient toujours battue, dès leur plus jeune âge, à des jeux beaucoup plus simples, a dû me décourager).
Mais, le cas du Moguédon me semble différent. Il ne s’agit pas d’un produit de consommation achetée par erreur, mais d’une œuvre sur laquelle j’ai travaillé durant plusieurs mois et que je ne peux me résoudre à abandonner. Et pourtant… Cette situation ne peut plus continuer : l’inachèvement du Moguédon a marqué le début d’une détérioration terrible dont je suis l’instigatrice et la victime (je vous en dirai plus un prochain bulletin) et je suis arrivée à la conclusion qu’une décision doit être prise. Mais laquelle ? Dois-je donc me mettre au travail ou plutôt le jeter à la poubelle ? Qu’en pensez-vous ?
J’aimerais connaître vos histoires d’objets inutiles, témoins d’une aspiration jamais réalisée. N’hésitez pas à m’écrire ou à commenter.
À bientôt,
L.M Rapp
Hello ! Ton texte est très bon ! Pourquoi tu ne publies pas ces chroniques régulièrement sur tes pages FB ? Bisous et à bientôt à Jérusalem, le 26/10 !